14.03.2022 - Julian Marx

Deux pour le prix de trois


Deux pour le prix de trois

La monnaie turque se déprécie rapidement. Les prix augmentent également dans la zone euro. L'inflation risque-t-elle d'être aussi massive ?

« Trois pour le prix de deux ! » – De tels slogans publicitaires font battre le cœur de nombreux chasseurs de bonnes affaires. En Turquie, cette image s'est toutefois inversée de manière dramatique au cours des derniers mois (et années). Compte tenu de l'inflation élevée, le slogan « deux pour le prix de trois » est la nouvelle réalité lorsque l'on se promène dans les rues d'Istanbul.

L'office turc des statistiques a annoncé une hausse des prix à la consommation de 48,7 pour cent en janvier par rapport au même mois de l'année précédente. Une accélération exceptionnelle – après une inflation de 36 pour cent en décembre et d'environ 20 pour cent au cours des mois précédents. Appliqué au quotidien des Turcs, cela signifie que pour l'argent avec lequel je pouvais m'acheter trois pommes il y a exactement un an, je n'en ai plus que deux aujourd'hui. Du point de vue d'un consommateur turc, le pouvoir d'achat de la lire turque a même diminué de 61 pour cent au cours des cinq dernières années (voir graphique). La stabilité des prix c’est autre chose.

Le thème de l'inflation est d’envergure social. En particulier, les salariés dont le salaire est inférieur à la moyenne ont généralement un faible pouvoir de négociation salariale en Turquie. Lorsque les prix augmentent de plusieurs dizaines de pour cent en l'espace de quelques mois, mais que les salaires des personnes à faible revenu ne suivent pas (ou pas au même rythme), il s'ensuit souvent des soucis existentiels. Comment payer le prochain loyer mensuel ? Aura-t-on assez d'argent pour acheter des chaussures aux enfants ?

Le coût d'une inflation élevée

Une forte inflation à des conséquences, et pas seulement en Turquie. Souvent, les perspectives de croissance baissent, les pays émergents sont particulièrement touchés. Si l'argent perd rapidement de sa valeur, les bailleurs de fonds étrangers retirent davantage leurs devises. Associée à une incertitude politique accrue, cette situation a déclenché une spirale de dévaluation de la lire turque. Au cours des cinq dernières années, la monnaie turque a perdu environ trois quarts de sa valeur par rapport à l'euro. La dette extérieure, mais aussi les importations, sont donc de plus en plus chères. L'incertitude qui résulte de l'inflation des coûts et de la dévaluation de la monnaie en matière d'investissement est énorme. Comment un entrepreneur peut-il planifier la construction d'une usine sur plusieurs années s'il n'a aujourd'hui aucune idée des coûts qu'il pourrait avoir à supporter ?

A court terme, l'économie turque a (encore) pu croître récemment malgré le contexte négatif. Le produit intérieur brut (PIB) réel de l'année 2021 était supérieur d'un peu plus de dix pour cent à celui de l'année 2019, c'est-à-dire avant l'éclatement de la crise Corona. D'une part, les exportateurs turcs ont profité de la chute de la lire turque. D'autre part, des taux d' intérêt trop bas ont continué à alimenter la consommation et sont en partie responsables du récent pic d'inflation de près de 50 pour cent observé en janvier.

Toutefois, la dynamique de l'inflation est aujourd'hui telle que de nombreuses personnes ne peuvent plus acheter quoi que ce soit avec la croissance du PIB de ces deux dernières années. Une évolution fatale d'un point de vue économique et social, dont les conséquences à moyen et long terme ne sont pas encore prévisibles aujourd'hui.

BCE – Interdiction de détourner le regard

Les habitants de la zone euro sont heureusement à mille lieues d'une telle hausse des prix à la consommation. Mais ici aussi, les risques de hausse de l'inflation ont nettement augmenté. En janvier, le taux d'inflation annuel dans la zone euro s'élevait à 5,1 pour cent, contre 5,0 pour cent en décembre. C'est bien plus que ce à quoi les consommateurs de la zone euro sont historiquement habitués, puisque le taux d'inflation moyen au cours de la dernière décennie était d'à peine 1,3 %.

Cela a incité la Banque centrale européenne (BCE) à revoir sa position en matière de politique monétaire. En décembre, la présidente de la BCE, Christine Lagarde, a affirmé ne pas vouloir augmenter les taux d'intérêt en 2022. Deux mois plus tard, en février 2022, il n'en est plus question au vu de l'inflation record de la zone euro. Au contraire, Lagarde a clairement indiqué que la présidente et le conseil des gouverneurs prenaient très au sérieux les dernières données sur l'inflation. En mars, elle souhaite annoncer ce que cela signifie concrètement pour la politique monétaire à venir.

Le "taux de pénalité" sera-t-il supprimé ?

La BCE a donc reconnu la gravité de la situation. Laisser filer une inflation qui pourrait s'autoalimenter n'est pas une option . L'évolution de la situation en Turquie devrait servir d'exemple à cet égard. La probabilité d'au moins une hausse des taux d'intérêt en 2022 a donc nettement augmenté. Pour les épargnants, la fin des « frais de garde » sur les dépôts, souvent appelés « taux de pénalité », pourrait donc arriver plus tôt que prévu.

L'objectif à long terme de stabilité des prix n'est toutefois pas gratuit. Le fait que des taux d'intérêt plus élevés entraînent des refinancements plus importants pour les entreprises, les États et les ménages, et puissent ainsi freiner les perspectives de croissance à court terme de la zone euro, est le prix qu'il faut être prêt à payer. Un prix qui devrait toutefois être payant à long terme !

 

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